(...) Difficile à appréhender, Beast Moans n’en possède pas moins une beauté hors norme. Chaotique, psychédélique et intriguant, le disque laisse l’impression à la première écoute d’ébauches de vieilles chansons retravaillées, un sentiment de déjà entendu au travers des mélodies. Puis le charme s’imprègne lentement dans chaque particule de notre peau et l’on finit par être fasciné par ce puzzle anti-cartésien : rock psychédélique, pop expérimentale, folk iconoclaste version Animal Collective, Hunky Dory passée à la moulinette Loveless... cette dimension sonique se révèle incroyablement foisonnante. (...)
Sur le papier, décrit avec quelques images habilement troussées et une poignée de mots soigneusement sélectionnés, un disque comme Beast Moans aurait tendance à séduire. On lancerait la grosse artillerie métaphorique, on ouvrirait le coffret à épithètes, on parlerait d'onirisme lo-fi, de lyrisme pré-apocalyptique, de maelström post-folk, d'aquarelle brossée à grands coups de guitares fauves, d'orgues fous et d'écho grésillant... le pire, c'est qu'on ne délirerait qu'à moitié, le disque demeurerait reconnaissable. La pochette est assez belle, en plus, cette frêle silhouette bizarrement accrochée, luth en main, à une falaise luxuriante, ce ciel jaune et rose, ça donne envie de se mettre au lit, casque sur la tête, de fermer les yeux et de se laisser happer. Mais l'on se réveille en sursaut quand Beast Moans apparaît pour ce qu'il est vraiment : prétentieux, bavard et hermétique. Un exercice de style très vain, qui, sous prétexte de partir à l'aventure, dérive sans boussole. (...)
(...) Car ici, chaque titre est proche de la schizophrénie et il est presque impossible de sortir d’une telle écoute sans un mal de crâne, sans une impression de devenir sourd. (...) Beast Moans est génial, tendre, drôle, sombre. (...)
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